ELLE ! Sa majesté contrainte et forcée ! Respect Madame !Vous n’aviez pas demandé à en être, mais l’ordre successoral vous a désignée et dès lors vous ne pouviez pas vous dérober. Pendant soixante-dix ans vous avez assumé la fonction avec dignité. Je n’irai pas jusqu’à dire et « avec retenue », car malheureusement il faudrait écrire « avec revenus » puisque…
Vous avez marqué l’Histoire par votre longévité sur le trône d’un Royaume dit Uni qui ne l’est pas plus que les États éponymes. Vous avez été cependant le ciment qui a rassemblé un Maori de Nouvelle-Zélande, un Écossais, un habitant de Nauru, un Inuit du Nunavut et un Londonien et j’en passe.
Vous partie, Madame, que restera-t-il de cet « empire » quelque peu désuet ?
Désuet aussi par son faste. J’hallucine quand je regarde à la télé le rituel pompeux et coûteux qui vous entoure et celui de votre successeur. Comment, en 2022, peut-il exister, à Londres, au Vatican ou ailleurs des cérémonies choquantes alors que la misère explose et que des crises à répétition s’abattent sur le monde ?
Vous, Madame, avez su laisser intactes des traditions en leur donnant encore un sens (c’est pour cela que je vous encense), mais après vous ? Les Italiens ont un mot que j’adore : aggiornamento. Littéralement, il signifie « mise à jour ». Historiquement, il est employé quand une Église (catholique, essentiellement) s’adapte au progrès. Par exemple, quand les prêtres ne portent plus de soutanes mais soutiennent les conceptions qu’elles recouvraient (mal du reste). Aggionamento, ce serait vraiment prendre en compte l’évolution du monde, plutôt que la freiner.
Vous, Madame, avez bien été obligée « d’admettre » que vos propres enfants avaient une autre conception de la vie que la vôtre (admirable du reste, comme les liens avec votre cher Philippe l’avaient démontrée). Votre successeur qui avait brisé des tabous sur la vie conjugale devra bien poursuivre la mise à jour… de quoi ? de tout ou presque, Madame !
Moi qui suis profondément attachée aux valeurs républicaines et aux formes nouvelles des sociétés, je vous ai admirée comme étant l’opposée de moi-même, mais avec une certitude, c’est que si vous aviez été seulement Élizabeth et pas The Second, nous aurions été d’accord sur presque tout.
Le rituel, la tradition et vous, Madame, ont été – je le répète – le ciment de votre Royaume. Pour votre successeur, je n’aurai qu’un conseil : « laisse béton ».
