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Le 20 août 1952 a été inhumé à Papenoo dans le cimetière au bord de la mer, devant M. le Gouverneur des E.F.O., les notabilités civiles et religieuses, M. Teriierooiterai, une grande figure de Tahiti. Son activité était égale dans tous les domaines. Il fut un des premiers membres de la Société d’Etudes Océaniennes, diacre…

Le vingt Août 1952 Tahiti a perdu un de ses fils parmi les plus distingués ; une grande figure parmi les plus représentatives de la valeur de nos anciens.

Ti’ati’a te toa i te fare fēti’i, Ua he’e Pohuetea i te tama, e tamaroa o Teriierooiterai nō te Manotahi i te Marae o Tahiti.

Né le 31 Octobre 1875 chez son grand-père Tehuritaua, dit Paa, à Punaauia, dans la province du Manotahi sise dans la division politique des Oropaa, il est de famille patricienne : des Tehuritaua du côté paternel et des Pohuetea du côté maternel.

Doué d’une vive intelligence, le jeune Teriieroo a hérité de ses ascendants deux grandes vertus qui sont la marque ancestrale de l’âme Tahitienne : l’affabilité et la simplicité.

Dès son plus jeune âge, son caractère s’affirme, sa personnalité s’impose d’elle-même, et malgré les vicissitudes de la vie il sait conserver inaltérés sa foi en Dieu, son dévouement et sa fidélité à la Mère Patrie et son amour pour la terre de ses ancêtres. Voilà ce que fut sa véritable noblesse et ce qui fit sa force.

A neuf ans, il quitte ses camarades de la campagne pour entrer à l’école publique de la capitale Vaiete, et en 1890, il complète sa formation primaire à l’Ecole des Frères de Ploërmel. A 17 ans, il se marie avec sa première femme Nohotua Maruhu a Moarii. Il faut alors qu’il gagne sa vie et sans difficulté il entre au service des Postes comme facteur. Quelle joie ! Quel bonheur pour Teriieroo de devenir le serviteur de la France sans avoir à renier ses sentiments tahitiens !

Mais tourner en rond dans les rues de la ville ne l’intéresse bientôt plus. Il sent qu’il peut faire mieux. Aisément il trouve un emploi à sa convenance ; il est nommé en 1898 instituteur-adjoint dans le district de Papenoo, où il passera toute sa vie.

Son origine et ses goûts le désignaient pour l’éducation, l’orientation de ses semblables, mais ce deuxième palier administratif fut surtout utile à sa propre formation. Il s’instruisit en enseignant, il commanda en apprenant à commander, il s’imposa.

Il n’a alors que 25 ans. Mais instinctivement, il a déjà senti toute la grandeur, toute la noblesse que le Français attache au mot « Servir ». Il sert la France en se penchant sur ses compatriotes, il est heureux de servir ; ses parents l’approuvent et en sont fiers, ses amis le félicitent et l’envient, ses chefs le remarquent et l’apprécient.

Le 25 Avril 1901 il est nommé chef de district de Papenoo par M. le Gouverneur Edouard Petit.

L’homme est à son affaire, diront les uns, je dirai simplement, l’homme est à sa place.

A partir de ce jour Teriieroo étonnera tous ses contemporains, par sa dignité, son doigté, son tact dans le commandement. Il surprendra même d’illustres visiteurs, tels que le Duc des Abruzzes, le savant Kroepelien, l’amiral Germinet, par ses réceptions et ses festins royaux. Il est véritablement chef.

L’année suivante il est nommé surveillant des Travaux Publics pour la côte Est de Mahina à Vaiovau.

A ces nominations successives de chef de district et des Travaux Publics, marques de confiance accordées par le Gouverneur de la Colonie, s’ajoute encore une décoration publique. Devant toutes les notabilités assemblées, ses collègues des districts, devant le Chef du Territoire, S.A.R. le Prince Hinoi, de Joinville, M. Salles, Inspecteur des Colonies épingle sur sa poitrine la croix de l’alliance française. Cette année-là fût la plus belle de sa vie. Il gagnera d’autres distinctions plus honorifiques ou plus glorieuses, mais aucune d’entre elles ne lui donnera la pure et forte joie qu’il ressentit quand il reçut publiquement cette première médaille.

En 1912 il devint membre de la Chambre d’Agriculture à laquelle il apporte en toute simplicité la contribution de ses connaissances sur la flore tahitienne.

La Légion d’Honneur en mars 1935

Vient la première guerre mondiale où nous faisons plus ample connaissance. Nous recrutons à la hâte, les deuxième et troisième contingents composés d’indigènes. Leurs papiers établis, Teriieroo à chaque départ les galvanisait de discours patriotiques, Il leur indiquait le chemin du devoir et tous partaient en chantant, fiers de faire partie de la première phalange tahitienne qui volait au secours de la Mère Patrie.

La grande victoire ramène le calme dans le pays et Teriieroo se retire dans son fief qui s’étend de Mahina à Afaahiti. Il devient le conseiller éclairé de tous les habitants de la côte Est. Dans toutes les assemblées sa chaude éloquence est toujours souverainement appréciée.

Son dévouement à la cause française en Océanie, sa conduite exemplaire de chef, sa fidélité aux Gouverneurs successifs lui donnent droit à la Légion d’Honneur, qui lui est accordée le 20 Mars 1935.

En 1937 il devient membre de l’Assemblée des Délégations Financières et Economiques de la Colonie où, avec ses connaissances du pays et des Tahitiens, il a certainement apporté des paroles de sagesse et de bonté.

Puis vient la deuxième guerre mondiale. Dès 1942 il est nommé membre du Conseil Privé. Son patriotisme sincère, sa pondération naturelle ont pesé d’une manière heureuse dans les décisions du Gouvernement local. Puis c’est la deuxième victoire pour lui.

Durant les années qui suivent, il est favorisé ; il récolte les fruits de la bonne semence. En 1944 il est décoré de la croix de la Libération ; en 1945 il reçoit l’Etoile Noire du Bénin et enfin suprême honneur, il est élevé au rang d’Officier dans l’ordre de la Légion d’Honneur.

Teriierooiterai grand et respecté a 71 ans. Il est à l’apogée de sa carrière. Sagement il se retire des affaires politiques. Sa santé est bien éprouvée. Il attend avec calme et sérénité l’appel de son Chef spirituel.

Après quatre années de repos bien mérité, la conscience satisfaite du devoir accompli, il s’est éteint à Papenoo le 20 Août 1952, pleuré de beaucoup, regretté de tous.

Ua ‘oto’oto te tōrea ‘āfa’i ro’o i nā Ono e Tau. Ua hi’a te toa nō Hapaiano’o. E mara’ai ma’ariri te mata’i, Ua ma’iri roa o TERIIEROOITERAI.

Martial IORSS

Texte et photos : Société des Études Océaniennes

Précision : la rédaction de PPM a conservé la graphie originale des textes publiés par la SEO.

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